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Redécouvrir Octave Mirbeau, redécouvrir le journaliste, le romancier, le critique d'art, le dramaturge, le libertaire, Mirbeau le malconnu... tel est l'objectif de cette nouvelle édition de Dans le ciel, un des romans les plus étonnants de sa somme romanesque. Pour accompagner la sortie de ce titre, Pierre Michel, président de la Société Octave Mirbeau, a bien voulu répondre à quelques-unes de nos questions...
Pierre Michel : « Ce n'est pas une découverte à proprement parler, à la différence des romans écrits comme nègre & qui étaient insoupçonnés (je viens d'en publier cinq dans mon édition critique de l'Œuvre romanesque de Mirbeau) [co-édition Buchet/Chastel-Société Octave Mirbeau, 3 vol., 2000-2001 - NdB]. En effet, le texte de Dans le ciel n'était pas inconnu des chercheurs ni des contemporains de Mirbeau, puisqu'il a paru sous sa signature dans les colonnes du quotidien L'Écho de Paris en 1892-1893. Mais Mirbeau ayant négligé de le retravailler afin de le publier en volume, il a fallu attendre 1989 & l'édition que J.-F. Nivet & moi avons publiée aux éditions de L'Échoppe pour que les lecteurs d'aujourd'hui puissent découvrir un texte resté fort méconnu & tardivement exhumé. »
Pierre Michel : « La construction en abyme est certes novatrice, mais n'est pas complètement nouvelle. Sans remonter au comte Potocki & à son Manuscrit trouvé à Saragosse, André Gide, dans Paludes, qui est aussi un bref roman de l'échec, a fait une expérience qui va plus loin encore que Dans le ciel. Mais il le publie deux ans après la prépublication de celui de Mirbeau... »
Pierre Michel : « Lucien ressemble fort à Van Gogh, en effet, & Mirbeau va jusqu'à lui prêter plusieurs des œuvres de Vincent. Il est bien un chercheur de neuf, qui, après avoir tâté de l'impressionnisme & du néo-impressionnisme, donne de l'œuvre d'art une définition tout à fait expressionniste : "Un paysage, c'est un état de ton esprit." Malheureusement, s'il est capable de concevoir des œuvres totalement novatrices, sa main "coupable", & qu'il finit par couper, est bien en peine d'être à la hauteur de ses conceptions. Du moins se l'imagine-t-il, car en réalité ce n'est pas sa main qui est à incriminer, mais son esprit, qui ne parvient pas à se libérer de toutes les "chiures de mouches" qui l'encrassent & qui résultent de l'éducation & de la culture ambiante ; & il se laisse contaminer dangereusement par les illusions de l'art nécrosé par excellence qu'est, aux yeux de Mirbeau, le préraphaélisme. De sorte qu'au dénouement il n'est pas sûr que le lecteur soit réellement tenté de voir en lui un héros positif. Lucien est un raté de la peinture comme l'un des narrateurs, Georges, est un raté de l'écriture. Au-delà de l'habituel plaidoyer de Mirbeau pour les "chercheurs de neuf", tel qu'il apparaît notamment dans ses articles recueillis dans ses Combats esthétiques, c'est la tragédie de l'artiste que Mirbeau cherche à nous rendre sensible. » |
16 février 1848-1858 Naissance d'Octave Mirbeau à Trévières
(Calvados). 1859-1863 Entre comme pensionnaire au collège des jésuites de Vannes. Comme son double Sébastien Roch (1890), le jeune Mirbeau est renvoyé de l'établissement dans des conditions suspectes : n'aurait-il pas subi des violences sexuelles de la part de son maître d'études ? 1866-1870 Obtient son baccalauréat. Alterne les séjours
à Paris, où il fait la fête sous prétexte
d'étudier le droit, & à Rémalard, où
il se résigne à devenir notaire. Amitié avec Alfred
Bansard des Bois. 1872 Secrétaire particulier de l'ancien député bonapartiste, Henri Dugué de la Fauconnerie, il rédige pour lui les éditoriaux politiques de L'Ordre. Il entame une longue carrière de « prolétaire de lettres », qui dure une douzaine d'années 1874 Il rédige, pour le compte d'Émile Hervet, un important compte rendu du Salon, signé R.V., où il encense Corot, Puvis de Chavannes & Manet, & éreinte les académistes, notamment Cabanel & Bonnat 1875-1879 « Nègre » d'Émile Hervet,
il publie deux nouveaux « Salons » dans L'Ordre :
il y démolit les valeurs consacrées, dénonce le
système des jurys & des médailles, l'École
des Beaux-Arts & les prix de Rome. 1879-1883 Secrétaire particulier d'Arthur Meyer,
directeur du Gaulois, quotidien monarchiste & mondain.
Collabore au Gaulois, à Paris-Journal, puis
au Figaro, d'où il est chassé après un
article à scandale contre la cabotinocratie, fin octobre 1882.
Poursuit sa carrière de « nègre »,
en rédigeant, de 1881 à 1886, une douzaine de volumes
(romans - L'Écuyère, La Belle Madame Le Vassart
-, recueils de contes & de nouvelles - Noces parisiennes, Amours
cocasses). Coulissier à la Bourse. 1884-1885 Mirbeau collabore au Gaulois légitimiste,
à L'Événement radical d'extrême
gauche & à La France, républicain modéré,
où il entame sous son propre nom une carrière de critique
d'art d'avant-garde : il y fait paraître ses Notes sur l'art
& son Salon de 1885. Il se lie d'amitié avec Raffaëlli,
Monet & Rodin. 1886 Couvre le Salon pour La France & y révèle Maxime Maufra & Constantin Meunier. Publie La Duchesse Ghislaine (janvier) & Le Calvaire (novembre), scandale 1887 Épouse en catimini Alice Regnault, ce qui le coupe définitivement de ses anciennes fréquentations politiques & mondaines. Installation à Kérisper, près d'Auray. « Révélation » de L'Idiot 1888-1889 Début de son amitié pour Gustave Geffroy & de son « culte » pour Mallarmé. Publication de L'Abbé Jules. Installation aux Damps, près de Pont-de-l'Arche (Eure) (1889) 1890 Parution de Sébastien Roch. Lance Maurice Maeterlinck par un tonitruant article du Figaro. Ralliement officiel à l'anarchisme 1891 Début d'une amitié très fervente
pour Pissarro, importants articles sur Van Gogh & Gauguin. 1892 Début de la parution en feuilleton de Dans le ciel. Fait entrer Bernard Lazare & Paul Adam au Journal, auquel il collabore sous le pseudonyme de Jean Maure |
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